Méthodes pédagogiques : plaidoyer pour l’apprentissage profond
Au milieu des années 1970, quelques chercheurs ont élaboré la théorie de l’apprentissage profond.
Ils soulignaient l’importance pour les étudiants d’exercer leur pensée
critique, de créer du lien entre les concepts et de relier les nouvelles
notions aux connaissances dont ils disposaient. Un ensemble de
démarches qui correspond bien à ce qui se passe lorsqu’on utilise les
cartes mentales, conceptuelles ou argumentaires.
Cela fait maintenant quelques années
(doux euphémisme !) que je travaille comme formateur et enseignant.
J’ai pu m’adresser à des publics aussi divers que des adolescents en
difficulté – en anglais ou plus généralement en méthodes de travail –
qu’à des demandeurs d’emploi en recherche de nouvelles opportunité ou
des ingénieurs d’une entreprise pétrochimique multinationale, pour ne
citer que quelques cas.
Quelques années aussi que je recherche
inlassablement outils et méthodes pédagogiques pour leur offrir le
meilleur et surtout pour les aider à réaliser leur potentiel.
Cliquez sur la mindmap Mindomo pour ouvrir la carte mentale interactive dans une autre fenêtre :
Approche profonde versus approche de surface
J’ai trouvé un article de l’Université d’Oxford qui résume très bien les trouvailles de Marton et Säljö.
Pour comprendre les différences entre les deux approches, je les ai synthétisées sous la forme d’une carte conceptuelle que voici.
Cliquez sur la carte conceptuelle pour ouvrir la présentation en ligne :
Autrement dit, les étudiants qui utilisent l’approche profonde sont nettement plus actifs que ceux qui approchent le cours en surface :
- ils créent du lien entre les idées
- ils anticipent les conclusions
- ils repèrent les structures et les principes organisateurs d’un cours
- ils intègrent les nouvelles notions aux connaissances déjà acquises
- ils ne se contentent pas de reproduire des parties du cours en vue de l’examen, mais interagissent activement avec les idées et les connaissances contenues dans le cours pour bâtir leur propre système de connaissance
En un mot, ils élaborent leur savoir personnel.
L’apprentissage profond : un choix stratégique
Cela veut-il dire que les étudiants sont "condamnés" à un style d’étude ? On est soit "apprentissage profond", soit "apprentissage de surface" comme on est blond ou brun de naissance ?
Absolument pas !
a) Un choix stratégique selon les circonstances
Les auteurs insistent sur le fait qu’il s’agit d’un choix de stratégie et que les mêmes étudiants utilisent d’ailleurs l’une ou l’autre approche selon l’intérêt qu’ils éprouvent pour la matière…
Et, sans doute aussi, selon le poids de cette matière dans leur cursus.
Autrement dit, vous pouvez choisir dès maintenant d’être un étudiant en "apprentissage profond".
b) Des approches différentes de la mémorisation
Marton et Säljö distinguent aussi d’autres utilisation de la mémoire dans les approches profondes et de surface.
Alors que les étudiants qui ont choisi
l’approche de surface considèrent la mémorisation comme une fin en soi,
ceux qui ont opté pour l’approche profonde utilisent la mémorisation des
éléments-clés comme moyen de mieux comprendre la matière et de mieux
l’intégrer dans leur propre système de connaissances.
Ils extraient du sens de ce processus de
mémorisation : ils relient les éléments mémorisés à des choses qu’ils
connaissent déjà ou qui peuvent illustrer les structures, les processus,
les éléments déterminant d’une matière.
Les étudiants qui choisissent l’approche
de surface fonctionnent comme des scanners : ils essaient de mémoriser
le plus grand nombre de faits possibles. Tandis que les étudiants qui
privilégient l’approche profonde fonctionne comme des ordinateurs en
réseau : ils agrègent des éléments-clés de la connaissance au réseau
pré-existant.
c) L’approche "reproduction de contenu" versus l’approche "construction du savoir"
Mais la différence fondamentale entre les deux approches se situe dans l’intention des étudiants.
L’approche "profonde" a pour objectif la "construction du savoir" : une élaboration personnelle du savoir.
Une approche à long terme qui permet d’obtenir les meilleures notes.
Et qui correpond aussi aux exigences des entreprises où l’on demande de
plus en plus d’initiative personnelle, de pouvoir s’autoformer,
d’intégrer de nouvelles connaissances et compétences en un temps record.
L’approche "de surface" privilégie la reproduction du contenu d’une matière : il n’y a pas d’interaction à proprement parler avec les éléments de connaissance, mais simple tentative de mémoriser le maximum de contenu.
Les étudiants peuvent d’ailleurs passer
relativement vite de l’approche profonde à une approche de surface si la
matière s’avère trop difficile ou s’ils ont une méthode de travail peu
adaptée aux exigences académiques.
Il n’y a donc pas de fatalité mais choix
conscient ou subconscient de stratégies en fonction des situations,
parfois par les mêmes étudiants sur les mêmes matières.
Pas de "types d’étudiants", mais un système complexe de choix stratégiques
On ne peut donc pas parler de "deux types
d’étudiants", mais d’un système complexes de choix stratégiques en
réponse à un environnement.
Mais alors, pourquoi un "plaidoyer pour l’apprentissage profond"
? Parce que j’ai la conviction profonde – elle aussi - qu’il répond
non seulement aux exigences académiques, mais surtout qu’il confère aux
étudiants la panoplie de compétences dont ils auront de plus en plus
besoin dans un monde où les professions les plus courues dans 10 ans
n’existent pas aujourd’hui.
Il y a 5 ans, personne ne parlait de
"community managers" : c’est aujourd’hui une des professions les plus
demandées. C’est aussi l’une de celles qui s’apprennent majoritairement
sur le tas, en "méthode expérientielle" : learning by doing, apprendre tout en faisant.
C’est l’une des modalités les plus intéressantes de l’apprentissage profond…
Dans un prochain article, j’examinerai
quelles sont les relations entre l’approche de l’apprentissage profond
et les outils visuels, tels que les cartes mentales, les cartes conceptuelles, les cartes argumentaires et les organisateurs graphiques.
Sources : Cliquer ici